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Rubrique : internautes / le droit pour tous
Mots clés : contrefaçon, droit, auteur, propriété, intellectuelle
Citation : Lionel THOUMYRE, "Le trouble des affaires Queneau", Juriscom.net, septembre 1997
Première publication : Planète Internet, n°22, septembre 1997, p. 34


Le trouble des affaires Queneau

Attention ! Les droits d'auteurs s'appliquent dans le cyberespace. La numérisation d'une oeuvre littéraire et sa mise en ligne ne peuvent se faire impunément.

Lionel Thoumyre


Pour éviter la contrefaçon, les propriétaires de sites web doivent recevoir l'assentiment du titulaire du droit de divulgation. Ou du moins, en principe, si l'on se réfère aux affaires Brel et Sardou en 1996 et, plus récemment, à la première affaire Queneau jugée le 5 mai 1997. Mais depuis le 10 juin dernier tout n'est plus si clair !

Voici qu'une Ordonnance du Tribunal de Grande Instance de Paris vient jeter le trouble. L'héritier du célèbre écrivain Raymond Queneau, certain du paiement de dommages et intérêts pour la diffusion de l'oeuvre de son père sur l’Internet, fut quelque peu surpris. D'autant plus qu'il avait précédemment gagné un procès l’opposant à Christian L. et au serveur Mygale. En effet, dans un jugement du 10 juin 1997, le tribunal a cette fois-ci conclu à "l'absence de contrefaçon" ! Est-ce à dire que les droits d'auteurs seraient désormais bannis du cyberespace ? N'allons pas trop vite... Ce qui est réprimé dans l’acte de contrefaçon, est le fait de donner la possibilité au public de prendre connaissance de l’œuvre reproduite. 

N'allons pas trop vite... Ce qui est réprimé dans l’acte de contrefaçon, est le fait de donner la possibilité au public de prendre connaissance de l’œuvre reproduite. En revanche, l’usage privé des reproductions est toléré. Ainsi, dès l'instant où le propriétaire d'un site web, consacré à son auteur favori, ouvre les portes de son "domicile virtuel" à la communauté des internautes, il risque de se mettre dans une situation illégale. C'est un peu comme si l'on inscrivait à l'entrée de sa maison : "Venez lire les oeuvres de mon poète préféré" en laissant la clé sur la porte. Dans ce cas, il y a bien contrefaçon.

Ce fût le verdict de la première affaire Queneau et la raison de la méprise de son héritier . Il n'avait pas apprécié la subtile différence entre les deux affaires. A nouveau, des reproductions numérisées des " Cent Mille Milliards de Poèmes " étaient mises à la disposition des internautes. Mais c’était bien malgré la volonté du propriétaire des fichiers en cause, Jérôme B. En théorie, les copies de l’œuvre ne pouvaient être consultées hors du réseau privé du Laboratoire d’Analyse des Systèmes du CNRS. Cependant, une défaillance du système de protection à permis à un agent de l'APP (Agence pour la Protection des Programmes) d’en prendre connaissance via l’Internet. Malchance ? Mystères de l’informatique ? Toujours est-il que les juges ont voulu tenir compte de la bonne foi de M. Jérôme B., lequel n’avait envisagé qu’un simple usage privé des reproductions de l’oeuvre. La demande en réparation de Jean-Marie Queneau fût donc rejetée. A situation exceptionnelle, décision exceptionnelle.

N’en déplaise à nombre de cybernautes, les droits d'auteurs conserveront leur entière vigueur sur Internet, il n’y a pas revirement de jurisprudence ! Néanmoins, nous saurons que les juges tiennent compte des caprices de l’informatique.

L.T.

Lien :

Ordonnance du TGI de Paris

 

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