DEMANDEUR
LA FRANCAISE DES JEUX
Société anonyme d'économie
mixte
représentée par Maître Véronique
JULLIEN, Avocat au barreau HAUTS DE SEINE PN 49
et assistée de Maître André
BERTRAND, Avocat au Barreau de PARIS L 207
c/
DEFENDEUR
SOCIETE ANONYME BINGONET
réprésentée par Maître
Jean-Christophe TRISTAN (Cabinet STIBBE SIMONT MONAHAN DUHOT et GIROUX)avocat au
Barreau de PARIS T 09
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président : Dominique
ROSENTHAL-ROLLAND, Vice-Président au Tribunal de grande instance de NANTERRE,
tenant l'audience publique des référés par délégation du Président du
Tribunal
Greffier : Isabelle MENARD,
Greffier
Statuant publiquement, par
ordonnance contradictoire, en premier ressort :
Nous. Juge des référés, après
avoir entendu les partes présentes ou leurs conseils à l'audience du 31 Août
2000, avons mis l'affaire en délibéré à ce jour :
Le 28 juillet 2000 la société
La Française des Jeux a assigné en la forme des référés la société
Bingonet sur le fondement de l'article L716-6 du Code de la propriété
intellectuelle afin :
- qu'il soit constaté qu'en faisant usage de la
dénomination " bananalotto ", en enregistrant les marques BANANA
LOTO et BANANA LOTTO, la société Bingonet s'est rendue responsable
d'actes de contrefaçon des marques LOTO.
- qu'il lui sait interdit provisoirement
d'utiliser la dénomination LOTO, sous astreinte de 25.000 francs.
- que l'exécution provisoire soit ordonnée.
- subsidiairement, que sait constituée une
garantie de dix millions de francs destinée à assurer l'indemnisation.
Vu les conclusions de la société
Bingonet qui sollicite le débouté des demandes en raison des arguments qu'elle
soulève à titre principal, quant au défaut de validité de la marque
LOTO de la Française des Jeux, pour caractère nécessaire, générique, usuel
et descriptif et à titre subsidiaire, quant à l'absence d'actes
de contrefaçon.
Elle sollicite paiement de
250.000 francs en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code
de procédure civile.
Vu les conclusions en réplique.
de la société La Française des Jeux.
SUR CE
Il est constant que la société
La Française des Jeux est titulaire de la marque LOTO enregistrée le 22 avril
1983 pour désigner notamment des loteries.
Cette société a constaté
l'existence sur le réseau Internet d'un site dénommé " bananalotto"
dont l'objet consiste en une loterie.
Ce site est exploité par la société
Bingonet qui a déposé en juin et juillet 2000 plusieurs marques dont BANANA
LOTO et BANANA LOTTO et a enregistré auprès de l'Internic les noms de domaine
: bananalotto.org, bananalotto.net, bananaloto.org., bananaloto.net,
bananalotto.fr.
Aux termes de l'article L 716- du
Code de la propriété Intellectuelle, lorsque le tribunal est saisi d'une
action en contrefaçon, son président statuant en la forme des référés peut
interdire provisoirement les actes argués de contrefaçon, si l'action au fond
paraît sérieuse et a été engagée à bref délai.
La société Bingonet fait valoir
que l'action au fond ne présente pas un caractère sérieux en ce que la marque
LOTO ne peut être valable pour être dépourvue de caractère distinctif, être
nécessaire, usuelle, générique.
La société La Française des
Jeux répond que la notoriété de la marque acquise par une publicité et un
usage soutenu a permis à la dénomination LOTO d'acquérir un usage distinctif
; qu'un sondage a révélé que le public associe le LOTO à un service de la
Française des Jeux ; que le terme LOTO est perçu par la public non comme un
jeu de loterie générique dérivé du jeu anglo-saxon, le bingo, mais
comme un jeu associé à la Française des Jeux.
Cependant, les dispositions de
l'article L 711-2 dernier alinéa ne sauraient s'appliquer à un terme usuel ou
générique. Or, il résulte des pièces versées aux débats que le terme LOTO
est usuellement employé pour désigner une espèce de jeu de loterie ; il
figure dans les dictionnaires depuis le début du vingtième siècle, dans des
ouvrages spécialisés ; il est cité dans la presse, dans l'affichage ; il est
utilisé pour des organisations de jeux sur tout le territoire français, par
les fabricants et distributeurs de jeux.
La question préalable de la
validité de la marque soulevée par la société Bingonet est suffisamment
grave pour empêcher, tant qu'elle n'est pas résolue, de considérer
l'action au fond de la société La Française des Jeux comme sérieuse.
En conséquence, il n'y a lieu de
faire application des dispositions de l'article L716-6 du Code de la propriété
intellectuelle.
L'exécution provisoire n'est pas
nécessaire compte tenu de la nature de la décision.
Il n'est pas inéquitable de
laisser les frais irrépétibles à la charge des parties ; il n'y a lieu de
faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure
civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement,
contradictoirement, en premier ressort et en la forme des référés.
Déboutons la société La Française
des Jeux de ses demandes.
Disons n'y avoir lieu à ordonner
l'exécution provisoire de la décision et à faire application des dispositons
de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Laissons les dépens à la charge
de la société La Française des Jeux.
Ont signé :
LE GREFFIER
LE PRESIDENT