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Rubrique : internautes / le droit pour tous
Mots clés : liens, hypertexte, hyperliens, contrefaçon, auteur, propriété, intellectuelle
Citation : Lionel THOUMYRE, "Liens hors-la-loi", Juriscom.net, septembre 1998
Première publication : Netsurf, n°29, août 1998


Liens hors-la-loi

Créer un lien d'un site vers un autre, c'est facile ! Quelques règles élémentaires doivent néanmoins être respectées. L'établissement des hyperliens n'est pas aussi libre qu'on veut le croire…

Lionel Thoumyre


La Netiquette nous conseillait jadis d'avertir le propriétaire du site que l’on aimerait lier. Une règle tombée en désuétude. Qui s'en plaindrait ? Certainement pas le propriétaire du site référencé dont la notoriété augmente au fil des liens. A condition toutefois qu'on puisse l'identifier… Car les liens peuvent aussi servir à s'approprier le travail d'autrui.

Il suffit de recourir à l'une des deux méthodes suivantes. Couramment utilisé, le "framing" permet d'afficher n'importe quel document disponible sur la toile dans l'une des fenêtres de sa page personnelle. Immanquablement, cette technique substitue l'adresse du site principal à celle du site lié dans la barre du navigateur. Plus sournois, le "in line linking" consiste à rapatrier des œuvres extérieures (une photo, un dessin ou un logo) pour les intégrer au sein d'une page uniforme. Les visiteurs penseront naturellement que l’ensemble du site est le fait d’une seule personne : le concepteur de la page affichée.

Le propriétaire des éléments spoliés voudrait-il protester ? A raison, on lui rétorquera que ses œuvres n’ont pas été reproduites. En effet, elles ont simplement été appelées par un code informatique. Les protections juridiques ne manquent pas pour autant. Au créateur de rappeler que l'article L.122-4 du Code de propriété intellectuelle condamne le simple fait de "représenter" ses œuvres sans son consentement. Quand bien même aurait-il donné son accord, l'article L.121-1 lui confère un droit moral inaliénable et imprescriptible sur l'ensemble de ses créations. Cette disposition s'oppose à l'usurpation de son nom ainsi qu'à toute action qui porterait atteinte à l'intégrité de son œuvre. Dès lors, l'insertion de celle-ci au sein d'un site pornographique ou révisionniste pourrait être considérée comme illicite.

Jusqu'à présent, seuls les tribunaux américains ont été amenés à traiter du caractère abusif des liens sauvages. Simple exemple : l'affaire Total News. En utilisant la technique du " framing ", la société Total News profitait du contenu de nombreux sites journalistiques. Mécontents, les ayants droit ont agit en justice pour détournement commercial et violation de leurs droits d’auteur. Les parties ont finalement conclu un accord en juin 1997 obligeant Total News à mentionner la source des documents liés. La création d'hyperliens ne semble plus jouir d'une absolue liberté.

Or, souvent par ignorance, de nombreux propriétaires de sites Internet ont maladroitement tissé des liens "hors-la-loi". Pour remédier à cette situation, deux étudiants de l’Université de Montréal, François-Xavier Farasse et Eric Labbé, ont lancé une campagne d’information et de protection sur les liens hypertextes (CIPertexte). Ils recommandent l’utilisation de leurs logos permettant "aux propriétaires de sites d’accorder au cas par cas une licence explicite de lier, les concepteurs devant obtenir l’autorisation des propriétaires". Une solution originale pour palier à la Netiquette oubliée.

L. T.

Liens :

La campagne "CIPertexte"

Synthèse des débats juridiques sur les liens hypertextes (Anne Giraudel)

 

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