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Rubrique : internautes / le droit pour tous
Mots clés : marque, nom, domaine, spéculation, cybersquatting, cybersquatteurs
Citation : Lionel THOUMYRE, "A vos marques !", Juriscom.net, décembre 1999
Première publication : Netsurf, n°44, novembre 1999


A vos marques !

Volant au secours des marques protégées, la justice française réprime souvent la spéculation sur les noms de domaine. Les maîtres chanteurs poursuivent malgré tout leurs activités. Avec toujours plus d’imagination…

Lionel Thoumyre


Le Tribunal de grande instance de Nanterre condamnait le 18 janvier dernier une société américaine, W3 System, à 1 million de francs de dommages et intérêts. La plus forte sanction appliquée en France à propos d’un conflit autour des noms de domaine ! W3 System l’avait bien cherché… Ayant acquis l’adresse "www.sfr.com", cette société redirigeait les visiteurs vers celui de France Télécom, le principal concurrent de la société SFR en matière de réseaux radiotéléphoniques. Cette pratique déloyale devait lui permettre de négocier la rétrocession du nom au prix fort. La justice l’en a découragé.

Inlassablement, les tribunaux affirment la prééminence du droit des marques sur l’enregistrement d’un nom de domaine. Il est simplement curieux de constater l’éternelle vigueur du "cybersquatting". Ce  phénomène a été favorisée par la politique du Network Solution Inc (NSI) qui bénéficiait, jusqu’au mois de septembre 1999, du monopole de la gestion des noms de domaine en ".com", ".org" et ".net". En effet, l’organisme américain ne s’est jamais inquiété de la correspondance entre les noms qui lui étaient soumis et l’existence d’une dénomination protégée. Depuis longtemps, n’importe qui peut afficher la marque de n’importe quelle société dans son adresse Internet en ".com". Il suffit d’avoir été le premier à l’enregistrer. "Ce n’est qu’à l’occasion d’un litige sur le nom de domaine que le NSI suspendra son utilisation" nous rappelle Romain Gola, chercheur  spécialisé sur les entreprises virtuelles à l’Université de Montréal . Il poursuit : "Le NSI opère ainsi un contrôle en aval plutôt qu’en amont. Cette attitude est typiquement américaine : on agit avant de réfléchir. Le système favorise nécessairement les spéculations !".

Les portes étant grandes ouvertes, le cybersquatter moyen sera tenté de réserver un nom connu et de le revendre au plus offrant. Selon notre spécialiste, "les entreprises sont prêtes à payer cher pour les noms génériques, par exemple : business.com ou television.com. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une marque protégée, le spéculateur devra trouver un prix de vente inférieur au coût supposé de la procédure en temps et en argent." Certains spéculateurs s’attaquent même aux entreprises qui ont déjà réservé leur adresse avec la particule magique en enregistrant une dénomination quasi identique. Semant la confusion, le squatter s’accapare ainsi le public distrait. Cas d’école : établi à Düsseldorf, Wilhelms Bastian a fait enregistrer "budgettelecom.com" aux dépends de la société Budgetelecom (avec un seul T). A la manière de W3 System, le gaillard s’est empressé de pointer son adresse Internet vers le site de Comparatel, féroce concurrente de la victime. Persuadé d’obtenir gain de cause en justice, la gérante de Bugetelecom nous confie qu’elle ne désire pas affronter une procédure "gourmande en temps et en énergie". Le contrefacteur aurait-il gagné la partie ? Point du tout, Pascale Greppo envisage maintenant de donner un nouveau nom au site qu’elle édite "en déposant toutes les extensions possibles  pour couper court à ce petit manège bien peu glorieux". Un bon moyen pour se faire justice soi-même.

L.T.

Liens :

La jurisprudence en droit des marques

 


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