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CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Décision n° 2000-433 DC du 27 juillet 2000

Loi modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986
relative à la liberté de communication

 

Loi du 1er août 2000 modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication

Doctrine : Jean-Eric SCHOETTL, "La nouvelle modification de la loi 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : dernier épisode en date d'un feuilleton constitutionnel", Les petites affiches, 31 juillet 2000 (151), p.12.

 

[Extrait] SUR L'ARTICLE 1er DE LA LOI :

Considérant que l'article 1er de la loi déférée insère dans le titre II de la loi du 30 septembre 1986 susvisée un chapitre VI intitulé : « Dispositions relatives aux services de communication en ligne autres que de correspondance privée » et comprenant les articles 43-7 à 43-10 ;

Considérant qu'il résulte de l'article 43-8 que « les personnes physiques ou morales qui assurent, à titre gratuit ou onéreux, le stockage direct et permanent pour mise à disposition du public de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature accessibles par ces services » ne peuvent voir leur responsabilité pénale ou civile engagée à raison du contenu de ces services que dans deux hypothèses ; que la première vise le cas où « ayant été saisies par une autorité judiciaire, elles n'ont pas agi promptement pour empêcher l'accès à ce contenu » ; que la seconde est relative à la situation où « ayant été saisies par un tiers estimant que le contenu qu'elles hébergent est illicite ou lui cause un préjudice, elles n'ont pas procédé aux diligences appropriées » ;

Considérant qu'il y a lieu de relever que l'article 43-9 inséré dans le nouveau chapitre VI du titre II de la loi du 30 septembre 1986 par l'article 1er de la loi déférée impose par ailleurs au prestataire d'hébergement « de détenir et de conserver les données de nature à permettre l'identification de toute personne ayant contribué à la création d'un contenu des services » dont il est prestataire ;

Considérant qu'il est loisible au législateur, dans le cadre de la conciliation qu'il lui appartient d'opérer entre la liberté de communication d'une part, la protection de la liberté d'autrui et la sauvegarde de l'ordre public d'autre part, d'instaurer, lorsque sont stockés des contenus illicites, un régime spécifique de responsabilité pénale des « hébergeurs » distinct de celui applicable aux auteurs et aux éditeurs de messages ; que c'est toutefois à la condition de respecter le principe de la légalité des délits et des peines et les dispositions de l'article 34 de la Constitution aux termes desquelles : « La loi fixe les règles concernant : ...la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables... » ;

Considérant qu'en l'espèce, au troisième alinéa du nouvel article 43-8 de la loi du 30 septembre 1986, le législateur a subordonné la mise en oeuvre de la responsabilité pénale des « hébergeurs », d'une part, à leur saisine par un tiers estimant que le contenu hébergé « est illicite ou lui cause un préjudice », d'autre part, à ce que, à la suite de cette saisine, ils n'aient pas procédé aux « diligences appropriées » ; qu'en omettant de préciser les conditions de forme d'une telle saisine et en ne déterminant pas les caractéristiques essentielles du comportement fautif de nature à engager, le cas échéant, la responsabilité pénale des intéressés, le législateur a méconnu la compétence qu'il tient de l'article 34 de la Constitution ;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de déclarer contraires à la Constitution, au dernier alinéa de l'article 43-8 de la loi du 30 septembre 1986, dans sa rédaction issue de l'article 1er de la loi déférée, les mots « -ou si, ayant été saisies par un tiers estimant que le contenu qu'elles hébergent est illicite ou lui cause un préjudice, elles n'ont pas procédé aux diligences appropriées » ;

Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution ;

DÉCIDE :

Article premier

- Sont déclarées contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi déférée modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :

- à l'article 1er, l'alinéa ainsi libellé : « -ou si, ayant été saisies par un tiers estimant que le contenu qu'elles hébergent est illicite ou lui cause un préjudice, elles n'ont pas procédé aux diligences appropriées » ;

- au vingt-quatrième alinéa de l'article 8, les mots : « assortie de la publication des auditions et débats du Conseil qui s'y rapportent » ;

- au dix-neuvième alinéa de l'article 15, les mots : « au compte d'emploi de la redevance audiovisuelle » ;

- le VI de l'article 71 ;

- le 1 du II de l'article 72.

Article 2

- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 juillet 2000, où siégeaient : MM. Yves GUÉNA, Président, Georges ABADIE, Michel AMELLER, Jean-Claude COLLIARD, Alain LANCELOT, Mme Noëlle LENOIR, M. Pierre MAZEAUD et Mmes Monique PELLETIER et Simone VEIL.

 

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