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Informations rapides

Février 2001

Rédacteur en chef / éditeur
Lionel Thoumyre



27 février 2001

Ça ne clique pas entre Amazon et Barnes & Nobles

Le libraire virtuelle Barnes & Noble.com (B&N) vient de remporter la première manche contre son rival Amazon.com, à propos d'un litige sur le brevet de la technologie "1-clique". Le jugement casse ainsi l'injonction du 2 décembre 1999 interdisant à B&N l’utilisation d’une pratique en commerce électronique consistant en la confirmation de sa commande par un simple clique de souris une fois les informations sur la carte de crédit et sur le transport remplies. Cette méthode, brevetée par Amazon, accélère le processus d'achat et, par conséquent, contribue à la satisfaction et à la fidélisation de la clientèle. À titre de riposte, B&N a lancé son système express lane qui reprenait essentiellement la combine de son rival. Le 21 octobre 1999, Amazon amenait le libraire virtuel en cour et obtenait l'injonction afin de bloquer le plagiat de sa méthode de commerce électronique. Respectant l'ordre de la magistrature, B&N a transformé sa caisse éclaire pour un système "2-cliques".

L'enjeu du débat aura un impact significatif sur la manière dont le United States Patents and Trademark Office (USPTO) octroie des brevets sur des méthodes de commerce. Dans le cas d'Amazon, il y a controverse puisque le modèle est tellement simple qu'il faut chercher où est l'innovation. De plus, la validité du brevet semble fragile puisqu'une partie pourrait, en théorie, soumettre au USPTO une preuve d'arts antérieurs en prouvant que la méthode a déjà été utilisée dans le passé par une autre compagnie.

En réponse à la querelle, le Congrès américain a introduit le Business Method Patent Improvement Act of 2000, un projet de loi prévoyant modifier l'attribution de brevets sur les méthodes de commerce. De plus, Jeff Bezos, le fondateur d'Amazon, a également confié ses craintes quant aux règles de propriété intellectuelle en cette matière. À l'époque de l'Internet, M. Bezos croit qu'un brevet comme le sien devrait avoir une durée de vie de 3 à 5 ans. Ceci favoriserait largement les compagnies ".com" ayant besoin d'innovation rapide ; contrairement à la règle traditionnelle des brevets de 17 ans qui s'adapte mieux à l'industrie pharmaceutique.

Charles Perreault
charlesperreault@hotmail.com

>"Barnes & Noble.com Wins One Over Amazon", Zdnet.com, 15 février 2001
<http://www.zdnet.com/intweek/stories/news/0,4164,2686340,00.html> ;

>Jeff Bezos, "An open letter from Jeff Bezos on the subject of patents", Amazon.com,
<http://www.amazon.com/exec/obidos/subst/misc/patents.html/107-0376396-0226134> ;

>Business Method Patent Improvement Act of 2000,
<http://www.techlawjournal.com/cong106/patent/bus_method/berman.asp> ;

>Le brevet de la technologie "1-clique" : Method and system for placing a purchase order via a communications network ,
<http://www.gnu.org/philosophy/amazonpatent.html > ;

>Francis Chu, "1-Click is the least of e-tailer's woes", Zdnet.com, 16 octobre 2000,
<http://www.zdnet.com/eweek/stories/general/0,11011,2639160,00.html> ;

>Michael J. Persson, " Amazon vs. Barnes and Noble - A Lesson in Dealing with Patents",
<http://tlc.perlarchive.com/articles/gen/mjp0001.shtml>.


27 février 2001

Premières réactions à l’avant-projet de loi sur la société de l’information

Le magazine Transfert.net nous a révélé un extrait significatif du texte non-définitif de l’avant-projet sur la société de l’information (LSI) le 6 février dernier. Considérée par certains comme une véritable loi  « patchwork », la LSI reprend une quantité impressionnante de textes préexistants pour les adapter aux services de la société de l’information : nouvelle adaptation de la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, réadaptation de certains passages du Code de la propriété intellectuelle, ajouts à la loi n°92-546 du 20 juin 1992... L’entreprise est ambitieuse et les résultats parfois dérangeants.

Par exemple, n’est-il pas étonnant de voir ressurgir, au chapitre la responsabilité des intermédiaires, une rédaction similaire à celle qui avait déplu au Conseil constitutionnel au point d’avoir été censuré en juillet 2000 ? Il est en effet ajouté à l’article 43-8 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 un nouvel alinéa visant à retirer l’exonération des personnes jouant le rôle d’intermédiaires pour un contenu illicite lorsque « ayant été informées par un tiers du caractère préjudiciable de ce contenu, elles n’ont pas accompli toutes diligences appropriées, celles-ci consistant notamment à vérifier la présence du contenu litigieux et à informer son éditeur de cette démarche ». Bien entendu, le législateur a pris soin de retirer chacun des aspects qui avait provoqué la censure par le conseil des sages. Tout d’abord, ces dispositions ne concernent plus la responsabilité pénale. Ensuite, le prestataire n’est plus « saisi » par le tiers, mais « informé » par celui-ci. Enfin, les caractéristiques du comportement fautif de l’intermédiaire sont maintenant précisées par un timide « notamment ». 

Cette opération de colmatage législative risque cependant de raviver les critiques portant sur la manière dont la responsabilité des intermédiaires est traitée par législateur. Madame Isabelle de Lamberterie, directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), nous confie son sentiment à propos de cette partie de l’avant-projet de loi : « Pour ce qui concerne la transposition de la Directive « commerce-électronique », j’aurai souhaité une loi spécifique sur les services de la société de l’information et non un plaquage des textes actuels relatifs à la responsabilité des prestataires des services de la société de l’information à l’intérieur de la loi sur la communication audiovisuelle ». Les services de la société de l’information et les services de communication audiovisuelle ne relèvent pas, en effet, d’une logique nécessairement similaire.

Dans la série de l’étrange, nous retrouverons également l’apparition d’un droit de réponse présenté comme suit : « Toute personne nommée ou désignée dans un service de communication en ligne dispose d’un droit de réponse sans préjudice de toute demande de correction ou de suppression du message pendant la période au cours de laquelle le message est encore accessible au public. » Ces personnes ont huit jour – délai à nouveau calqué sur le régime de l’audiovisuel – pour  exercer  leur droit de réponse après la cessation de la mise à disposition du public du message fondant l’exercice de ce droit. Huit jour, c’est peu. Mais sachant que le délai ne court qu’à partir du jour où la mise à disposition du public du message a cessé, l’exercice du droit de réponse à l’encontre d’un site qui maintien ses archives en ligne deviendrait en réalité perpétuel. Ces dispositions se font ainsi l’écho de la notion d’infraction de presse successive sur Internet instaurée par un courant jurisprudentiel récent (voir affaires Jean-Louis C. et Voltaire) et qui pourrait avoir de graves répercutions sur l’exercice de la liberté de presse en ligne. Il serait encore plus regrettable que cette disposition puisse s’appliquer à tout type de site Web, professionnel ou non. Les éditeurs individuels ne pourraient en effet plus se déplacer loin du Net, puisqu’en cas de silence gardé sur la demande (plus de huit jours), le demandeur pourra demander au juge de référé d’ordonner la mise à disposition du public de la réponse « au besoin sous astreinte ». Sans être assortie d’exceptions, une telle disposition sonnerait le glas des sites personnels comme Juriscom.net !

Lionel Thoumyre
Directeur de Juriscom.net

Liens :

>Dossier complet sur la LSI, sur Transfert.net :
<http://www.transfert.net/fr/dossiers/dossier.cfm?idx_dossier=4> ;

>Soyez les premiers à débattre de la LSI sur le forum de Juriscom.net :
<http://www.juriscom.net/forum/read.php3?admview=1&f=3&i=646&t=646>.


23 février 2001

Manque de cohérence à l’OMPI

Depuis sa création en décembre 1999, le centre d’arbitrage de l’Office Mondial de la Propriété Intellectuelle (OMPI) a reçu plus de 2000 plaintes de "cybersquatting". Des 1300 dossiers traités à ce jour, près de 80% ont abouti à des transferts d'adresses vers leurs véritables titulaires.

Ces statistiques reflèteraient une certaine cohérence dans les décisions du centre. Mais il se pourrait que les apparences soient trompeuses. En effet, Jeff Burgar, un individu possédant 75 adresses Internet de noms d’artistes célèbres, a récemment fait face à des accusations de "cybersquatting" de la part de Bruce Springsteen, puis de Céline Dion. Dans les deux cas, le scénario était le même : il a acheté l’adresse ("brucespringsteen.com" et "celinedion.com"), puis l’a fait pointer vers la page "celebrity1000.com" jusqu'à ce qu’il mette sur pied un site "non-autorisé" dédié à l’artiste en question.

Alors que l’OMPI a donné raison aux représentants de la chanteuse québécoise, le Boss s’est fait répondre que son "cybersquatteur" avait « démontré qu’il avait certains droits ou intérêts légitimes quant au nom de domaine » et donc que la plainte était injustifiée. Pourtant, les deux sites sont en tout point identiques (outre les caractéristiques propres aux artistes), laissant planer un certain doute sur l’uniformité des critères utilisés par les arbitres du centre.

Ces décisions contradictoires font surface au moment même où l’OMPI tente d’obtenir le monopole d’arbitrage pour les noms de domaines nationaux. Cela pourrait pousser certains pays réticents à refuser l’entente proposée.

Nicolas Vermeys
vermeysn@attcanada.ca

Liens :

>Reuters, « WIPO shows Springsteen who’s The Boss », ZDNet.com, 7 février 2001,
<http://www.zdnet.com/zdnn/stories/news/0,4586,2683321,00.html> ;

>Karine Solovieff, « Cybersquatting : l’OMPI se contredit, 01Net, 22 février 2001,
<http://www.01net.com/rdn?oid=138154&rub=1642> ;

>Site de l’OMPI :
<http://www.ompi.org>.

>Pages contestées :
<http://www.celinedion.com> ;
<http://www.brucespringsteen.com>.


22 février 2001

Les courriels sur écoute

Le 5 février dernier, Richard Smith, de la Privacy Foundation, a dénoncé l’existence d’un mécanisme de mise sur écoute des courriels jusqu’à présent inconnu du grand public. Découvert le 5 octobre 1998 par Carl Voth et baptisé « Reaper Exploit » par ce dernier, ce mécanisme utilise certaines des options du langage « Dynamic HTML » de Microsoft pour surveiller la progression d’un courriel que l’on fait suivre.

« L’exploit » fonctionne seulement si l’utilisateur ouvrant un message sur écoute utilise un logiciel de courriel pouvant lire le langage HTML et ayant la fonction JavaScript activée par défaut. Tel est le cas, entre autre, pour les logiciels Outlook et Outlook Express de Microsoft et Messenger de Netscape 6. Par conséquent, les utilisateurs possédant des logiciels ne supportant pas le Document Object Model (DOM) JavaScript ne devraient pas courir de risques.

Selon les explications de Richard Smith, « si l’on fait suivre un message à un tiers, le code JavaScript dissimulé dans la page peut lire tout le texte ayant été ajouté au message initial ». Ce code est activé dès l’ouverture du courriel et retourne alors silencieusement le texte ajouté à l’émetteur du premier message. Les possibilités d’espionnage industriel, commercial ou même privé sont donc innombrables.

Ainsi, pour éviter d’être espionné, il suffit de désactiver JavaScript dans votre logiciel de courriel. Cependant, cela ne vous aidera guère si vous faites suivre un message sur écoute à un tiers n’ayant pas pris de telles précautions…

Nicolas Vermeys
vermeysn@attcanada.ca

Liens :

>Jean-François Codère, « Gare à la mise sur écoute des courriels », Multimedium, 6 février 2001, <http://www.mmedium.com/cgi-bin/nouvelles.cgi?Id=5037> ;

>Richard M. Smith, « Email Wiretapping », Privacy Foundation, 5 février 2001, <http://www.privacyfoundation.org/commentary/tipsheet.html> ;

>Richard M. Smith, « Advisory on Email : Email Wiretapping », Privacy Foundation, 5 février 2001, <http://www.privacyfoundation.org/advisories/advemailwiretap.html> ;

>Carl Voth, « Reaper Exploit », Reaper exploit, 29 novembre 1998,
<http://www.geocities.com/ResearchTriangle/Facility/8332/reaper-exploit-release.html>.


22 février 2001

La signature numérique voit le jour en Allemagne

Le 15 février dernier, l'Allemagne a approuvé une loi octroyant à la signature numérique la même force juridique que son homologue sur papier. Suite à la Directive européenne du 13 décembre 1999, l'Allemagne figure parmi les premiers pays de l'Union à adopter une telle législation. Pour l'Europe des 15, la signature numérique est perçue comme étant un moteur pour le développement du commerce électronique. L'Allemagne soutient à elle seule une industrie technologique employant 800 000 personnes et qui créera probablement 750 000 emplois additionnels d'ici 2010.

Cette nouvelle méthode de contracter est rendue possible par des logiciels. L'émetteur peut sceller ses documents, les crypter et, du même coup, s'identifier lui-même. Lors des pourparlers durant l'année 1997, l'Europe était divisée sur la perspective de la sécurité d'un tel paraphe. Par conséquent, la Directive adoptée en 1999 affirme que le statut légal de la signature numérique ne se réserve qu'à une signature techniquement avancée et basée sur des certificats de qualification. Afin de satisfaire aux exigences européennes, l'Allemagne devra se doter d'une agence veillant à l'applicabilité de la méthode numérique.

  Charles Perreault
charlesperreault@hotmail.com

>Allemagne : Digital Signature Act (Signaturgesetz, SiG) :
<
http://www.chiark.greenend.org.uk/pipermail/ukcrypto/1998-April/001484.html> ;

>Europe : European Union Digital Signature Directive
<http://www.chiark.greenend.org.uk/pipermail/ukcrypto/1998-April/001484.html`> ;

>Elizabeth De Bony, "Europe in Digital-Signature Drama", Thestandard.com, 30 novembre 1998,
<
http://www.thestandard.com/article/display/0,1151,2683,00.html > ;

>Chris Kuner, Rosa Barcelo, Stewart Baker et Eric Greenwald, "An Analysis of International Electronic and Digital Signature Implementation Initiatives", Internet Law and Policy Forum, septembre 2000,
<http://www.ilpf.org/digsig/analysis_IEDSII.htm> ;

>Rick Perera, "German Cabinet Approves Digital Signature Bill", Thestandard.com, 17 août 2000,
<http://www.thestandard.com/article/display/0,1151,17760,00.html>.


21 février 2001

Internet, boutique hors-taxe ?

Le 8 février 2001, le sénat américain a introduit un projet de loi limitant le pouvoir de taxation des états de l'Union sur le Web. La pièce législative propose une exemption de taxes permanente aux prestataires de services Internet et l'extension d'un moratoire de taxes sur le commerce électronique jusqu'en 2006. A titre d'illustration, la loi interdirait à un gouvernement local de taxer les services Internet qu'offrent AOL. De plus, un état ne pourrait pas fixer de taxes sur les échanges entre acheteurs et vendeurs en ligne de différentes juridictions. En d'autres termes, un produit acheté en Californie par un résident de New York ne serait pas imposable.

Puisqu’il existe actuellement plus de 30 000 juridictions de taxes aux États-Unis et 7000 taux de taxation locaux et régionaux pour les biens et services, le Internet Tax Non-Discrimination Act vise à éviter les chevauchements d'imposition entre les états. Le projet de loi est une continuation de l'Internet Tax Freedom Act (ITFA) de 1998. Signée par le Président Clinton, la législation avait semé la joie chez les commerçants en ligne, mais la consternation chez les commerçants en brique. Le ITFA interdisait aux gouvernements locaux de taxer les biens vendus sur Internet en dehors de leurs frontières. Contrairement aux magasins virtuels, les magasins "réels" doivent récolter les taxes de ventes, encourageant ainsi la clientèle à chercher un achat à rabais sur Internet. Cependant, selon les auteurs du projet de loi, les Sénateurs Christopher Cox et Ron Wyden, la politique hors-taxe ne fait qu'encourager une industrie technologique qui a fait sa grande part pour la croissance économique du pays.

Charles Perreault
charlesperreault@hotmail.com

>Internet Tax Freedom Act :
<http://www.english.uwosh.edu/hill/94-475/students/culotta/leg.html> ;

>Internet Tax Non-Discrimination Act :
<http://thomas.loc.gov/cgi-bin/query/D?c107:1:./temp/~c107u5UTj3::> ;

>Permanent Internet Tax Moratorium :
<http://www.theorator.com/bills106/s1611.html> ;

>Caron Carlson, "Bipartisan Internet tax bill launched", Zdnet.com, 8 février 2001,
<http://www.zdnet.com/filters/printerfriendly/0,6061,2683771-2,00.html> ;

>Laura Golden-Mumane, "E-Commerce and Internet Taxation (Industry Trend or Event)", Findarticles.com, juin 2000,
<http://www.findarticles.com/cf_0/m0DPC/6_8/62767117/print.jhtml> ;

>Aaron Lukas,  "An Internet Tax Nightmare", Cato Institute's Center for Trade Policy Studies,
<http://www.freetrade.org/pubs/articles/al-6-30-99.html>.


14 février 2001

Le début de la fin pour Napster ?

L’industrie du partage en ligne de fichiers MP3 vient de subir un dur revers. En effet, un banc de trois juges de la 9ème U.S. Circuit Court of Appeals, a San-Francisco, a conclu hier que Napster encourageait ses membres à violer la législation américaine portant sur les droits d’auteurs et, par le fait même, les droits des maisons de disques.

Après avoir souligné que l’injonction originale de la Juge Patel, empêchant l’entreprise de fonctionner jusqu’au procès, était beaucoup trop large parce qu’elle plaçait tout le fardeau du contrôle sur Napster, le tribunal a cependant admis qu’une injonction provisoire n’était « pas seulement appropriée, mais nécessaire ». Ainsi, les parties devront se représenter devant la magistrate pour  qu’une nouvelle injonction soit dessinée afin de permettre aux différentes compagnies de disques d’obliger provisoirement Napster à limiter l’accès à leur matériel protégé par droits d’auteurs.

Napster prétend toujours que ses activités sont parfaitement licites et même protégées par le Audio Home Recording Act, une pièce législative permettant, entre autres, l’usage de magnétoscopes. L’entreprise compte donc faire appel de la décision. « Nous sommes déçus du verdict d’aujourd’hui » admet Hank Barry, C.E.O. de l’entreprise, « selon cette décision, Napster pourrait devoir fermer – même avant un procès sur les mérites de la cause ».

De leur côté, les partisans de l’industrie musicale crient victoire. « La Cour d’appel […] a jugé en notre faveur sur chaque principe juridique abordé », s’exclama Hilary Rosen, présidente de la Recording Industry Association of America (RIAA).

Cette décision de la 9ème U.S. Circuit Court of Appeals, en soutenant la nécessité d’une injonction, ne donne toutefois pas de directives claires sur les méthodes à employer. Ainsi, comme ce sont les membres de Napster qui nomment leurs fichiers, comment l’entreprise peut-elle identifier et ainsi contrôler le contenu de ceux-ci ?

Nicolas Vermeys
vermeysn@attcanada.ca

Liens :

>Décision de la 9ème U.S. Circuit Court of Appeals au format PDF :
<http://www.napster.com/legalupdate/> ;

>Communiqué de presse de Napster :
<http://www.napster.com/pressroom/pr/010212.html> ;

>AFP, « Décision de justice contraire à Napster, mais pas de fermeture immédiate du site », Multimédium, 12 février 2001,
<http://www.multimedium.com/cgi-bin/nouvelles.cgi?Id=5073> ;

>The Associated Press, « Napster says it will appeal ruling », CNN, 12 février 2001, <http://www.cnn.com/2001/LAW/02/12/napster.decision.04/index.html> ;

>Pour plus d'informations, voir l’article de Nicolas Vermeys, « La saga Napster », Juriscom.net, 11 octobre 2000,
<http://www.juriscom.net/int/dpt/dpt29.htm>.


12 février 2001

Nouvelle injonction contre les liens profonds

L’un des premiers dossiers impliquant la Directive européenne sur la protection des bases de données pour lutter contre des liens « profonds » a été disputé sur le sol germanique en janvier dernier. StepStone, le « leader européen du recrutement en ligne » a obtenu une injonction d’un juge allemand visant à empêcher une entreprise rivale de créer des liens hypertextes vers ses pages Web.

Aux dires de la demande, OFiR, une entreprise médiatique danoise également propriétaire de portails de recrutement en ligne au Royaume-Uni, en Allemagne, au Danemark et en France, utilisait ces liens pointant vers les pages de « StepStone.com » pour augmenter son volume d’affaire. OFiR pouvait ainsi présenter un volume plus important d’annonces disponibles à partir de son propre site et augmenter corrélativement celui de sa clientèle. De plus, ces liens outrepassaient la page de garde de StepStone, empêchant la visualisation de ses annonces publicitaires et l' identification directe de la source par le public.

Afin de respecter l’injonction, OFiR a dû réaménager son site et y retirer les liens litigieux. L’injonction, que nous n’avons pu obtenir, se serait fondée sur la Directive 96/9/CE concernant la protection juridique des bases de données. Il s'agit de l'une des premières affaires impliquant cette directive pour lutter contre les liens profonds, c’est-à-dire les liens outrepassant les pages de garde.

Comme l’a souligné Adrian Lifely, avocat chez Osborne Clarke, la firme britannique représentant StepStone dans ce dossier, « [c]e n’est pas, bien sûr, tous les cas de liens hypertextes qui sont illégaux – l’Internet s’arrêterait soudainement. Mais les cours européennes ont le  pouvoir d’intervenir lorsque les liens sont excessifs et préjudiciables au site concerné ». Me Lifely affirme également que cette injonction établit un précédent important puisque de tels dossiers risquent de se multiplier au fur et à mesure que la réglementation de l’Internet prend de l’ampleur.

D’autres titulaires de droits entreprennent déjà des démarches semblables. Un conflit similaire entre l’entreprise de publication Haymarket et la compagnie de produits pétroliers Burmah Castrol sera bientôt portée devant les tribunaux.

Nicolas Vermeys
vermeysn@attcanada.ca

Liens

>Jean Eaglesham, « Online recruiter wins ban on rival’s web links », Financial Times, 17 janvier 2001,
<
http://globalarchive.ft.com/globalarchive/articles.html?id=010117001339> ;

>Kieren McCarthy, « StepStone sets precedent with hyperlink ban », The Register, 17 janvier 2001,
<
http://www.theregister.co.uk/content/6/16147.html> ;

>« Net injunction sets legal precedent », Internet Works, 18 janvier 2001, <http://www.iwks.com/news/jan2001/0784.asp>.

Voir également :

>Lionel Thoumyre, "Un juge français condamne le tissage de liens profond, Juriscom.net, Actualités, 17 janvier 2001, <http://www.juriscom.net/actu/achv/200101.htm#0126-2> ;

>Débat sur la légalité des liens hypertextes :
<http://www.juriscom.net/forum/read.php3?f=3&i=527&t=527>.


12 février 2001

Les détectives mènent l'enquête sur Net

D'après l'OCLCTIC (Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la comminication), près de 1000 affaires de cybercriminalité ont fait l'objet d'un traitement judiciaire. Pour aider les entreprises à lutter contre ce fléau, et à identifier les cyberdélinquants, les détectives privés high tech fourbissent leurs armes.

Loin des planques et voiture, des prises de photographies parfois à limite de la violation de la vie privée, Alain Stevens mène l'enquête depuis son bureau, et traque des individus peu recommandables avec ses ordinateurs et ses accès Internet.

Menaces par e-mail, dénigrement sur des forums, vols de fichiers informatiques… des préjudices de plus en plus nombreux naissent chaque jour, tant au détriment des entreprises que des particuliers. En dépit des nombreux projets de loi et conventions de lutte contre la criminalité dans le cyberespace, le recours à des services d'investigations privés semble promu à un avenir prometteur, tant il est vrai que les individus recherchés s'emploient à brouiller les pistes.

Liens :

>Le site de Alain Stevens :
<http://www.investigations-online.com> ;

>L'Ordinateur Individuel, "Le cyberdétective mène ses enquêtes sur le web", <http://www.01net.com/rdn?oid=134963> ;

>Le Monde, "Un limier sur le réseau",
<http://interactif.lemonde.fr/article//0,5611,2867--133614-0,00.html> ;

>L'abeille du Web, "Profession : cyberdétective",
<http://www.abeilleduweb.com/ficheCP.phtml?id=107>.

Pour joindre Alain Stevens, détective privé :
infos@investigations-online.com
Tél. 04 93 68 02 50 – 06 03 41 19 21


12 février 2001

Réactions à la loi canadienne sur la protection des renseignements personnels

Après trois ans de consultations et de débats, la loi canadienne sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques est finalement entrée en vigueur le 1er janvier 2001. Selon son préambule, son but serait de "[...] fixer, dans une ère où la technologie facilite de plus en plus la circulation et l'échange de renseignements, des règles régissant la collecte, l'utilisation et la communication de renseignements personnels d'une manière qui tient compte du droit des individus à la vie privée[...]."

Cette nouvelle législation a été élaborée en réaction à la Directive européenne 95/46/CE relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel de 1995. Cette directive interdit aux pays européens de faire affaire avec des pays tiers ne possédant pas de législation protégeant suffisamment les renseignements personnels.

La loi a été accueillie tièdement. Alors que plusieurs applaudissent l'initiative fédérale, d'autres dénoncent déjà ses faiblesses. Jacques Frémont, constitutionaliste et Doyen de la Faculté de droit de l'Université de Montréal, critique par exemple l'article 30, en vertu duquel la loi fédérale s'appliquerait, d'ici trois ans, au commerce intra-provincial, domaine habituellement de compétence provinciale.

Pour Don McGowan, avocat spécialiste en contentieux du commerce électronique chez Stikeman Elliot, bien que l'objet législatif soit louable, les moyens choisis sont peu adaptés aux réalités du e-commerce. "La loi va engendrer des coûts énormes pour les entreprises" dit-il, coûts que les start-ups "ne pourront tout simplement pas assumer". Par ailleurs, le texte législatif souffrirait d'une rédaction "trop imprécise, trop floue".

Ces commentaires trouvent échos dans le milieu du commerce électronique. David Elder, chef adjoint des services juridiques au département de droit réglementaire chez Bell Canada,  affirme qu’ "[…] il n’existe pas de consensus dans l’industrie quant au type de renseignements personnels visés par la loi, notamment en ce qui a trait aux profils de clients", dont les entreprises revendiquent généralement un droit de propriété exclusive. 

Effectivement, selon William Abécassis, directeur des technologies chez nCubeAIT, une start-up montréalaise, sa compagnie "ne sait pas trop comment mettre en oeuvre cette loi". nCubeAIT,  qui compile de données personnelles pour le compte de grandes institutions, se retrouve, comme beaucoup d’autres entreprises oeuvrant dans le commerce business to business dans une position précaire. "Si on dévoile nos profils de clients, on dévoile notre expertise, on dévoile notre plan d’affaire", s'inquiète Monsieur Abécassis.

Si ces critiques s’avèrent justes, la loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, loin de favoriser le commerce et la protection de la vie privée, pourrait avoir un effet contraire.

Maître Cédric Sabbah
Avocat aux barreaux de Paris et Montréal
cedric_sabbah@lawyer.com

Liens :

>Texte de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques,
<http://canada.justice.gc.ca/fr/lois/P-8.6/index.html> ;

>Site Web d’Industrie Canada sur la politique gouvernementale en matière de commerce électronique et de vie privée,
<http://e-com.ic.gc.ca/francais/privee/632d1.html> ;

>Témoignage du professeur Jaques Frémont devant le Comité permanent de l’industrie lors des audiences du projet de loi,
<http://www.parl.gc.ca/InfoComDoc/36/1/INDY/Meetings/Evidence/indyev99-f.htm> ;

>Numéro spécial "Vie de privée à l'ère des inforoutes" de la revue internatioanle Lex Electronica,
<http://www.lex-electronica.org>.


8 février 2001

Pornographie virtuelle au banc des accusés

Est-il criminel de posséder une image numérique modifiée mettant en scène des enfants en pleine activité sexuelle ? C'est le débat qu'abordera la Cour Suprême des États-Unis en octobre prochain. Le Department of Justice relance une décision de la Cour d'appel du 9ième Circuit ayant rejeté, en décembre 1999, deux amendements du Child Pornography Protection Act. Avant 1996, il était interdit de produire, distribuer ou posséder du matériel illustrant de réels enfants en activité sexuelle. Viennent ensuite les deux modifications de la pièce législative élargissant ainsi la notion de la pornographie juvénile. En fait, les deux amendements précisent que tout matériel sexuellement explicite dans lequel le sujet "paraît être" ou "donne l'impression d'être" un mineur est taxé de pornographie juvénile. Le Free Speech Coalition, une maison de production reliée à l'industrie de la pornographie, a gagné la première manche en Cour d'appel en rendant les modifications inconstitutionnelles au motif qu'elles étaient vagues et trop larges.

Selon le juge Donald W. Molloy de la Cour d'appel, criminaliser la pornographie infantile virtuelle, c'est condamner un comportement en l'absence de victime réelle. Dans une entrevue avec le New York Times, l'avocat Robert Flores rejette les prétentions du magistrat. En fait, les deux amendements du Child Pornography Protection Act viennent faciliter l'application de la loi. La technologie de numérisation et de modification d’images est telle qu'il est parfois impossible de faire la différence entre une photo illustrant un enfant réel ou un enfant virtuel. Ce faisant, un pédophile accusé peut être acquitté en semant un doute raisonnable sur l'authenticité des images. En d'autres termes, il n'a qu'à argumenter que les photos sont de pures créations numériques. Dans United Satates v. Kimbrough, l'argument a été utilisé par un pédophile, mais le jury ne l'a pas retenu et l’a condamné. Reste à voir comment la Cour Suprême jugera le sort… de l'enfant numérique.

Charles Perreault
charlesperreault@hotmail.com

Liens :

>Carl S. Kaplan, « Supreme Court to Consider Digital Images », New York Times, 26 janvier 2001,
<http://www.nytimes.com/2001/01/26/technology/26CYBERLAW.html> ;

>Linda Greenhouse, «S upreme Court Roundup: Justices to Weigh Issue of Child Pornography and Computer-Generated Images », New York Times, 23 janvier 2001,
<http://www.nytimes.com/2001/01/23/national/23SCOT.html> ;

>Jerry Hall, « Domino Effect: Where Could the Child Pornography Protection Act Lead them Internet? »,
<http://www.tatebywater.com/features/099705.html> ;

>The John Marshall Law School: Center for Information Technology and Privacy Law , Bibliographie législative, jurisprudentielle et académique sur la pornographie juvénile sur Internet,
<http://www.jmls.edu/cyber/index/cp.html> ;

>United States Section of Regulation of Child Pornography on the Internet, Bibliographie législative sur la pornographie juvénile,
<http://www.cyber-rights.org/reports/uscases.htm>.


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