26
octobre 2000
Echelon vous observe
Vos
communications électroniques sont peut-être interceptées en ce moment-même.
Echelon projette encore et
toujours le scénario du roman d’Orwell, 1984, sur la scène
internationale. En France, la commission de Défense de l’Assemblée
nationale a publié, la semaine dernière, un rapport de 80 pages pressant
la communauté européenne d’adopter une législation protectrice pour ses
citoyens et ses entreprises.
Cette
décision vient à la suite d’une enquête menée par la DST française,
sous la direction de Jean-Pierre Thierry, visant à déterminer si Echelon était utilisé à des fins d’espionnage industriel et à
découvrir les individus concernés (journalistes, politiciens).
Selon
les autorités françaises et certains groupes de protection du citoyen américains,
Echelon serait un système de surveillance des télécommunications
créé durant les années 70 et 80 et dirigé par la National
Security Agency (NSA) américaine et ses homologues canadien, anglais,
australien et néo-zélandais. Ce réseau possèderait plus de 120
satellites et postes récepteurs, permettant à ses propriétaires
d’intercepter des milliards d’ondes (satellites, cellulaires,
micro-ondes) et de messages circulant sur les réseaux de fibres optiques (téléphones,
télécopieurs, courrier électronique), soit près de 180 millions de
messages par heure. Cette information serait alors recueillie et utilisée,
entre autre, pour favoriser les industries nationales des pays concernés.
Quoique
la plupart des participants aient admis l’existence d’Echelon,
la presse et le gouvernement américain continuent à nier la participation
de leur nation dans ce projet et personne ne semble connaître les capacités
et l’utilité réelle du système. D’ailleurs, selon la American Civil Liberties Union (ACLU), « Il n’y a aucune
façon de savoir si Echelon est utilisé illégalement pour espionner les
citoyens ».
Un
comité européen mis sur pied pour évaluer l’impact d’Echelon
a débuté ses travaux le 12 octobre dernier. Le groupe désire entre autre
déterminer le rôle des américain dans l’affaire et assurer la sécurité
des membres de l’Union Européenne.
Nicolas Vermeys
vermeysn@attcanada.ca
Liens :
>Site
de l’ACLU :
<http://www.aclu.org/echelonwatch/index.html>
;
>Ludovic
Nachury, « Echelon : des lois pour protéger les entreprises françaises »,
01net, 11 octobre 2000,
<http://www.01net.com/rdn?oid=124232> ;
>Will
Knight, « France to investigate US-British spy network », ZDNet,
5 juillet 2000,
<http://www.zdnet.co.uk/news/2000/26/ns-16418.html> ;
>The
Associated Press,
« France urges anti-U.S. spy measures », CNN, 12 octobre 2000,
<http://www.cnn.com/2000/WORLD/europe/France/10/12/France.echelon.ap/index.html> ;
>Pour
approfondir la question, voir l’article du professeur Yves Poullet, « Les
Safe Harbor Principles - Une protection adéquate ?", Juriscom.net,
17 juin 2000,
<http://www.juriscom.net/uni/doc/20000617.htm>.
25
octobre 2000
Cyber-cinéma
au
Scour
Le
dernier succès hollywoodien manque à l’affiche près de chez vous ?
Pourquoi ne pas le retrouver chez Scour ? Le serveur de cette entreprise permet en effet d’échanger,
sur internet, des films ou tout autre fichier multimédia. Mais le site
pourrait en être à ses derniers jours. Suite aux récidives de
l’industrie du cinéma, Scour a
déclaré faillite le 12 octobre dernier.
Cette
mesure vient à la suite d’une poursuite conjointe intentée le 20 juillet
2000 par la Motion Picture Association
of America (MPAA), la Recording
Industry Association of America (RIAA), la
National Music Publishers Association (NMPA), ainsi que tous les grands
studios de cinéma et compagnies de disques. Selon les plaignants, cette
poursuite aurait pour but d’endiguer
la duplication et la distribution illicite de documents protégés par
droits d’auteurs. En les activités de Scour
viendraient priver l’industrie du cinéma de plusieurs milliers de dollars
annuellement. Selon les dires de la MPAA, l’association désire encourager
la promotion de nouvelles technologies comme celles exploitées par Scour,
mais seulement si le tout est fait légalement.
Scour, dont les dettes
s’élèvent à 4 millions de dollars américains, a préféré se réfugier
derrière la U.S. Bankruptcy Court for
the Central District of California à Los Angeles. L’entreprise
encourt également le risque de devoir payer jusqu’à 150 000$ par film téléchargé,
soit une somme avoisinant les 250 milliards de dollars américains. Selon
Dan Rodrigues, le président de Scour,
la faillite permettra à l’entreprise de se restructurer et d’améliorer
sa position actuelle, tous les procès la concernant étant temporairement
suspendus. Cependant, tout ceci pourrait s’avérer inutile, puisque les
nouveaux investisseurs sont difficiles à dénicher dans une telle
situation. M. Rodrigues continue de
croire en la viabilité de l’entreprise qui, selon lui, n’enfreint
aucune loi. « Nous avons
travaillé avec les plus grands experts en droits d’auteurs pour créer un
service qui serait conforme à toutes les lois applicables, incluant la
Digital Millenium Copyright Act de 1998 ».
Avant
les procès, Scour avait conclu
des ententes avec Miramax Films et
Hollywood Records et était sur le
point de faire de même avec Sony
Music, Warner Music et BMG Entertainment. D’autres ententes semblables pourraient peut-être
donner un second souffle à l’entreprise en ligne, tout en mettant fin à
ses problèmes juridiques.
Nicolas
Vermeys
vermeysn@attcanada.ca
Liens :
>Site
de Scour,
<http://www.scour.com>
;
>Isabelle
Dumonteil, « Scour, le Napster de l’image, se déclare en faillite
pour sauver sa peau », 01net,
16 octobre 2000,
<http://www.01net.com/rdn?oid=124588>
;
>Jim
Hu, « Scour files for bankruptcy protection », CNet,
13 octobre 2000,
<http://news.cnet.com/news//0-1005-200-3178822.html> ;
>John
Borland, « Movie studios target Scour with copyright lawsuit », CNet,
20 juillet 2000, <http://news.cnet.com/news/0-1005-200-2302214.html> ;
>Martin
Stone, « Scour Could Face $250 Billion in Liability », BizReport,
17 octobre 2000,
<http://www.bizreport.com/daily/2000/10/20001017-2.htm>.
24
octobre 2000
L’échange
de courriels personnels sur les lieux de travail ne constitue pas une faute
grave
Dans
un jugement en date du 2 mai 2000 le Tribunal du travail de Bruxelles
rejette la justification du licenciement pour motif grave d’un employé
qui entretenait des relations épistolaires intimes par courrier électronique
à partir de son lieu de travail. Il condamne néanmoins le salarié à des
dommages et intérêts pour avoir abusé de la messagerie interne dans un
but personnel.
L’employeur
observait depuis plusieurs mois un retard très anormal dans
l’accomplissement des tâches de son responsable du système informatique.
Ayant décidé de contrôler l’activité professionnelle de cet employé
prétendument surchargé, il a découvert que ce dernier entretenait une
relation épistolaire électronique très dense avec une autre employée
pendant ses heures de travail. Ces messages « chauds » démontraient
en outre que l’employé était bien peu concentré sur son travail.
L’employeur a donc décidé de le licencier pour motif grave, une sanction
contestée par le salarié qui s’oppose en outre à ce que les courriers
soient versés au dossier.
S’appuyant
sur l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme, le
tribunal estime que l'échange de courriers électroniques entre les deux
employés relève de leur vie privée. Afin de savoir si l’atteinte de
l’employeur est justifiée, les juges vérifient que le contrôle exercé
était nécessaire, indispensable et proportionnel. Aussi le nombre, la
longueur des messages – déterminée par le nombre d’octets – et leur
caractère privé reconnu suffisent-ils aux juges, qui refusent de se référer
au contenu des messages, pour apprécier la réalité et la gravité du
motif invoqué. Le tribunal rend finalement son verdict :
l’importance du nombre de messages ne constitue pas un motif grave en-soi.
Le jugement précise que les magistrats ont été fortement influencés par
le fait que l’employeur n’ait pas cherché à vérifier plus tôt les
raisons des anomalies de productivité de son subordonné.
Cependant,
la grande fréquence des échanges justifie un licenciement pour faute légère
et le paiement de dommages et intérêts au profit de l’employeur. Le défaut
de rentabilité n’a pas été retenu ici pour évaluer la réparation car
le tribunal a estimé que l’employeur a participé au dommage par son
comportement passif.
La
vie privée des deux employés a ainsi été préservée. Mais ceux qui
pratiquent l’échange intensif de courriers électroniques ou la
navigation sur Internet à des fins personnelles sur leurs lieux de travail
ne peuvent guère plus prétendre à l’impunité.
Juliette
Lenfant
juliette_lenfant@yahoo.com
Liens
:
>Patrice
Bonbled, « Vie privée au bureau : première décision belge »,
D&NT, 16 octobre 2000,
<http://www.droit-technologie.org/2_1.asp?actu_id=-259352001&month=10&year=2000>
;
>Olivier
Teulières, « Surfer
au bureau : vos droits et devoirs », L’Internaute, 18 septembre
2000,
<http://www.linternaute.com/webutile/droitbureau/droitbureauitw.shtml>.
NDLR
: Juliette Lenfant est l'auteure d'une étude réalisée à l'Université de
Montréal intitulée "Le droit à la vie privée s'étend-il à l'utilisation du courriel par un employé dans le cadre de ses fonctions
?", maintenant disponible sur Juriscom.net : <http://www.juriscom.net/uni/etd/04/presentation.htm>.
21
octobre 2000
Quand
la corbeille menace la liberté d’expression
Dans
son essai intitulé “In Defense of the Delete Key”, le juge
Rosenbaum suggère une limite de six mois pour utiliser les déchets numériques
comme moyen de preuve. Au-delà de cette période, les fichiers supprimés
sont considérés comme légalement périmés.
Lorsque
nous vidons la corbeille de notre ordinateur ou que nous utilisons la
touche de suppression, l'information ne disparaît pas, elle est
simplement mise hors de notre portée, cachée dans un coin obscur de
notre disque dur. Mais le juge James M. Rosenbaum estime qu'une telle
information doit bel et bien être considérée comme supprimée.
Il remarque que les données “ressuscitées”
peuvent causer du tort à un intimé si elles sont utilisées et interprétées
hors de leur contexte. Par exemple, des propos salés échangés par
courriel entre deux collègues de bureau demeurent toujours, malgré leur
suppression, des pièces à conviction potentielle à la décharge de l'un
d'entre eux. Plusieurs avocats profitent, voire abusent, de cette
situation en pratiquant de l'archéologie informatique afin de retrouver les
déchets numériques qui serviraient leur cause.
Selon
le juge de la Cour du district du Minnesota, la mémoire éternelle de
l'ordinateur provoquerait l'autocensure chez les utilisateurs. Une
situation que les principes de liberté d'expression garantis par le 1er
amendement de la Constitution américaine ne sauraient tolérer.
D'où la proposition de limiter dans
le temps la portée légale des déchets numériques. Le juge précise
encore qu'un courriel à la blague, isolé et ne démontrant pas la faute
reprochée doit être irrecevable comme moyen de preuve. Par contre, si
l'analyse de l'information permet de conclure à la continuation objective
du comportement reproché, les déchets numériques dépassant la limite
de six mois peuvent être admis. Reste à voir si les suggestions et la réflexion
du juge auront un impact dans la jurisprudence à venir.
Charles
Perreault
charlesperreault@hotmail.com
Liens
:
>Essai
du juge Rosenbaum : "In Defense of the Delete Key",
<http://www.greenbag.org>
;
>Carl
S. Kaplan, "One
judge's opinion: delete should mean delete", New York Times, <http://www.nytimes.com/2000/10/06/technology/06CYBERLAW.html>.
20
octobre 2000
Solution
à la saturation des “.com”
Le
2 octobre dernier, l’ICANN
a publié sa nouvelle liste d’extensions des noms de domaine. Face à la
saturation des top-level-domains (TLD), soit les“ .org ”, “
.net ” et “ .com ”,
l’organisme chargé de l’administration des noms de domaine de
l’Internet a lancé une campagne de souscription pour ces racines numériques.
Au total, 45 compagnies ont payé 50 000 dollars américains dans le
but de proposer et d’opérer une extension de nom de domaine. Face à la
ruée, la société Name.Space
Inc s’est réservée, à elle seule, la gestion de 118 extensions.
Dans
les mois à venir, l’ICANN fera une sélection finale d’une poignée
de TLD dont les noms varient du “.sex” au “.kids”. L’initiative
de l’organisme soulève quelques critiques dans le milieu des
internautes. D’une part, la multitude des extensions pourrait accroître
les conflits de marque de commerce. Le
cybersquating, cette pratique consistant à saisir le
nom d’une société et de le revendre au prix fort sous forme
d’URL, fait toujours rage parmi les “.com”. Or, la situation
pourrait bien empirer avec les TLD. D’autre part, les nouvelles
extensions ne viennent pas simplifier la tâche pour les
cyber-consommateurs peu avertis. Un mélomane devra-t-il magasiner un CD
de Sony sur les pages “sony.jazz”, “sony.music”,
“sony.sound”, “sony.biz” ou “sony.media” ?
Exemples
tirés de la liste
des TLD de Name.Space Inc :
.music
.news
.now
.nyc
.one
.online
.opera
.page
.partners
.people
.planet
.politics
.power
.productions |
.projects
.properties
.radio
.records
.school
.service
.sex
.shoes
.shop
.show
.security
.society
.sound
.shareware |
.site
.software
.solutions
.soup
.space
.sports
.star
.studios
.sucks
.systems
.tech
.temple
.theater
.time |
.times
.toys
.trade
.travel
.voice
.war
.watch
.weather
.women
.world
.writer
.zine
.zone |
20
octobre 2000
Responsabilité
des prestataires : première application de la loi du 1er août 2000
C’est au
Tribunal de grande instance de Paris qu’est revenu le privilège
d’appliquer les nouvelles dispositions relatives à la responsabilité des
prestataires Internet contenues dans la loi
du 1er août 2000.
One Tel,
un opérateur téléphonique et fournisseur d’accès, a découvert deux
sites dont le contenu lui porte préjudice non seulement en présentant des
propos outranciers à son encontre mais aussi en bafouant ses droits sur ses
marques et ses droits d’auteur.
Ne sachant
comment obtenir réparation auprès des titulaires anonymes des sites en
cause, la société One Tel se retourne naturellement vers l’hébergeur :
Multimania. Elle lui reproche, d’une part de ne pas avoir pris les
mesures appropriées de nature à mettre un terme au trouble résultant de
la diffusion du contenu illicite et, d’autre part, de ne pas lui avoir
fourni les informations nécessaires à l’identification des auteurs de
ces sites.
Multimania
lui répond qu’elle lui a communiqué des informations précises relatives
à l’inscription et aux connexions de ses abonnés. Elle lui rappelle
ensuite que ces données font apparaître que l’un des auteurs des sites
litigieux est un abonné de la demanderesse qu’elle peut elle-même
d’identifier à partir de son propre journal de connexions. Multimania
conclut ainsi que les demandes formulées au cours de l’instance sont sans
objet et doivent être rejetées.
En se fondant
sur les dispositions de l’article 43-9 de la loi
2000-719 du 1er août 2000,
l’ordonnance délivrée le 20 septembre 2000 par le Tribunal de
grande instance de Paris déboute la société One Tel. Elle constate
notamment qu’« en permettant à OneTel de prendre connaissance de
sa qualité de fournisseur d’accès des sites litigieux, la Société
Multimania a incontestablement satisfait à l’obligation légale de
fourniture des données de nature à permettre l’identification d’une
personne ayant contribué à la création d’un contenu de services dont
elle est prestataire ».
Bien que
l’ordonnance maintienne les effets de la suspension des sites prise par Multimania,
elle déclare que cette mesure cessera de plein droit après trois mois si
la société demanderesse ne prend pas, durant ce laps de temps,
l’initiative de soumettre au juge compétent ses griefs à l’encontre
des auteurs des sites en cause.
Lionel
Thoumyre
Liens :
>Ordonnance
disponible sur Juriscom.net,
<http://www.juriscom.net/txt/jurisfr/cti/tgiparis20000920.htm>
;
>Pour
approfondir le sujet, voir l'article
de Cyril Rojinsky, "L’approche
communautaire de la responsabilité des acteurs de l’Internet", Expertise,
octobre 2000 ; réédité sur Juriscom.net,
<http://www.juriscom.net/pro/2/resp20001011.htm>.
20
octobre 2000
Un
cyber-parfumeur en eaux troubles
« Qu’importe
le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse ». L’adage de Musset
ne ferait pas autorité dans l’industrie du parfum. En effet, la société
Parfumsnet vient d’être condamnée, le 4 octobre dernier, pour
avoir vendu sur Internet une gamme de produits d’Yves Saint-Laurent et
de Van Cleef & Arpels sans l’autorisation des sociétés
concernées.
Ces
dernières allèguent la mise en place d’un réseau de distribution sélective
pour leurs produits reconnue valide par la Commission européenne. Elles
reprochent donc à Parfumsnet d’avoir commercialisé leurs produits
« parfumant et cosmétique » au travers de son site
Internet sans avoir sollicité un quelconque agrément. En outre, Parfumsnet
se serait rendu responsable d’agissements fautifs particulièrement sérieux,
« la présentation de certains produits ne correspondant pas à
leur destination ni à leurs conditions d’utilisation ». Inutile
de rappeler que le secteur de la parfumerie est régi par le système de
distribution sélective qui impose des critères de vente essentiellement
adapté à la distribution « physique ». Le flacon importe bien
plus qu’on ne le croirait…
De
son côté, Parfumsnet dénonce les pratiques commerciales des
demanderesses qui tenteraient ainsi de s’assurer l’exclusivité du marché
sur Internet. Mais le Tribunal de commerce de Nanterre tranche finalement en
faveur d’Yves Saint-Laurent et de Van Cleef & Arpels
dans un attendu qui mérite d’être relevé : « Internet étant,
en fait, un simple moyen de communication, il ne saurait constituer en soi
un marché pertinent ; qu’il constitue, en l’espèce, seulement un
élément du marché des parfums et produits cosmétiques ; qu’il
doit donc obéir aux règles de ce marché ; qu’en l’espèce ce
marché est caractérisé par la présence d’un réseau de distribution sélective
mis en place par les sociétés Yves Saint-Laurent Parfums et Parfums Van
Cleef & Arpels SA ; que la licéité de ce réseau a été reconnue
et n’est pas, à ce jour, remise en cause ». Le magistrat
ordonne finalement la cessation sous astreinte de toute commercialisation au
moyen du site Internet « Parfumsnet.fr » des gammes de produits
des sociétés demanderesses.
Le
fondateur de Parfumnet a décidé de faire appel de cette décision
et envisage de s’adresser « aux instances communautaires européennes ».
Lionel
Thoumyre
Liens :
>Ordonnance
disponible sur Juriscom.net,
<http://www.juriscom.net/txt/jurisfr/ce/tcnanterre20001004.htm>
;
>«
Parfumnet
privé des parfums Yves Saint Laurent », Journal du Net, 10 octobre 2000,
<http://www.journaldunet.com/0010/001010parfumsnet.shtml>
;
>Pour
approfondir le sujet, voir l’article de
Yann Dietrich et Alexandre Menais, « Réseau
de distribution et vente sur Internet », Cahiers
Lamy droit de l’informatique et des réseaux,
mai 2000 ; réédité sur Juriscom.net,
<http://www.juriscom.net/pro/2/ce20000602.htm>.
13
octobre 2000
Les jeux
sont faits
La
Française des jeux a été déboutée, par une ordonnance du
Tribunal de grande instance de Nanterre du 14 septembre 2000, de ses
demandes en contrefaçon de la marque « LOTO » contre la société Bingonet
qui fait usage de la dénomination "Bananalotto".
La
Française des jeux demandait qu'il soit constaté que la société
défenderesse s'est rendue responsable d'actes de contrefaçon, sur
fondement de l'article L. 716-6 du Code de la propriété intellectuelle,
des marques LOTO et qu'il lui soit interdit d'en poursuivre l'usage. Le
magistrat en charge de l’affaire constate cependant que les dispositions
de l'article L. 711-2 dernier alinéa "ne sauraient s'appliquer à
un terme usuel ou générique" et que "la question préalable
de la validité de la marque soulevée par la société Bingonet est
suffisamment grave pour empêcher, tant qu'elle n'est pas résolue, de
considérer l'action au fond de la société La Française des Jeux comme sérieuse."
Lionel
Thoumyre
Liens :
>Ordonnance
disponible sur Juriscom.net,
<http://www.juriscom.net/txt/jurisfr/ndm/tginanterre20000914.htm>.
13
octobre 2000
Droit
d’auteur contre cybersquatting
Si
de nombreux noms de domaine ont été restitués, en France, par l’effet
du droit des marques, c’est au titre du droit d’auteur qu’une société
vient d’être condamnée à 50 000 FF de dommages-intérêts pour des
actes de cybersquatting.
Le
Tribunal de grande instance de Nanterre s’est ainsi prononcé en faveur du
propriétaire d’Ecran Noir, un ciné-zine francophone qu’il a créé
au Canada, dans une affaire l’opposant à la société française Productions
du Téléphone.
Vincent
avait fait héberger son site par la société défenderesse en mars 1998.
Voulant le transférer vers un nouvel hébergeur, il constate que le titre
"Ecran Noir" avait été déposé par la société Productions
du Téléphone auprès de l’Internic sous plusieurs noms de
domaine en .com, .net et .org. Après avoir tenté d’obtenir, sans
succès, la restitution amiable de ces noms, Vincent assigne à jour fixe la
défenderesse devant le TGI de Nanterre sur fondement de la violation de son
droit d’auteur sur le titre "Ecran Noir".
Le
tribunal devait tout d’abord déterminer que le titre existait bel et bien
avant que la défenderesse ne le dépose en noms de domaine en mars 1998.
Sur ce point, le demandeur réussit à prouver que le titre existait dès
1996 en rapportant notamment des coupures
de presse en provenance du journal Québécois Le Devoir et du
magazine Yahoo Internet Life.
Le
magistrat rejette ensuite le caractère générique et descriptif de
l’expression « écran noir » pour lui accorder le trait
d'originalité nécessaire à sa protection par le droit d'auteur : « S’il
est exact que [l'expression] se retrouve dans une chanson de Claude Nougaro
sous la forme : Sur l’écran noir de mes nuits blanches, encore
faut-il relever qu’elle ne constitue pas le titre de cette chanson et
qu’elle est utilisée par [le demandeur] dans un genre différent du monde
musical, ce qui est de nature à éviter toute confusion ». Il
conclut que le demandeur est bien titulaire d’un droit d’auteur sur le
titre "Ecran noir" et ordonne à la société Productions du Téléphone,
qu'il condamne à 50 000 FF de dommages-intérêts, de procéder à la
restitution des noms de domaine.
Lionel
Thoumyre
Liens
:
>Jugement
disponible sur Juriscom.net,
<http://www.juriscom.net/txt/jurisfr/ndm/tginanterre20000920.htm>.
12
octobre 2000
Liens hypertextes
: coupables par ricochet
D'après
un jugement récent aux États-Unis, un lien qui amènerait l'internaute
vers un contenu illégal serait lui-même… illégal.
Eric
Corley, est propriétaire de la publication papier et électronique « 2600:
The Hacker Quarterley ».
Son site contient des centaines de liens où l'on peut retrouver les pages
web contenant l'outil de décryptage DeCSS, un code inventé par des hackers
européens qui permet aux utilisateurs de décrypter les digitals versatile discs (DVD). Mais les grands d'Hollywood,
regroupés sous la Motion Pictures
Association of America (MPAA), ont
voulu mettre fin à la distribution sur Internet de la technologie DeCSS.
Ils accusent Corley de violer le
Digital Millenium Copyright Act,
une pièce législative signée par le Congrès et le Président américain
en 1998, protégeant les œuvres d’auteurs de la piraterie électronique.
Dans
son jugement rendu le 17 août dernier, le Juge Lewis A. Kaplan de la Cour
du district sud de New York à Manhattan déclare que Eric Corley a violé
le Digital Millenium Copyright Act,
ce dernier interdisant de fournir au public un outil conçu pour reproduire
des œuvres protégées.
La
décision innove en déterminant le caractère licite d’un lien en
fonction de l'intention du liant. Afin de mettre en cause un propriétaire
de site web liant un autre site dont le contenu peut s'avérer illégal, la
demande doit prouver, d'une part, que le propriétaire savait que la page liée
contenait du matériel illégal ; d'autre part, qu'il savait que le matériel
en question n'était pas offert légalement sur le marché ; et, enfin, que
l'objet principal d'un tel lien est la distribution d'une technologie ou
d'un contenu illégal. Le test évalue les circonstances dans lesquelles le
lien est affiché afin de voir si le liant annonce le fait qu'on peut y
retrouver du matériel délictueux.
Si
le jugement survit son appel, il restera à déterminer si un lien n'est pas
une forme d'expression protégée par le 1er Amendement de la
Constitution américaine. Mais il est surtout à craindre que le jugement
puisse avoir un effet inhibiteur sur les propriétaires de sites web qui
devront faire preuve de diligence quant à leurs relations virtuelles.
Charles
Perreault
charlesperreault@hotmail.com
Liens :
>MPAA
et jugement :
<http://www.mpaa.org/Press>
;
>Digital
Millenium Copyright Act
:
<http://ibureaudigilib.usia.gov/aug99/laws/majorlaw/digimil.htm>.
11
octobre 2000
Big
Brother corporatif : l’espiologiciel
La
vie privée des internautes est devenue une source d’intérêt non
seulement pour les grandes corporations du web, mais également pour un
recours collectif. Une plainte déposée aux États-Unis
tente de mettre un frein à l’espiologiciel, un programme
permettant de surveiller les habitudes de navigation des utilisateurs
d’internet.
Selon
les demandeurs, Netscape et America
Online, violeraient les législations américaines du Electronic
Communications Privacy Act et du Computer
Fraud and Abuse Act. Les
deux corporations qui ont fusionné en novembre 1998 surveilleraient le
téléchargement
de fichiers par les internautes de différents sites web. Au moment de la
fusion corporative, Netscape dévoila
au public SmartDownload, un
programme permettant de poursuivre un transfert de fichiers ayant été
interrompu auparavant. Intégré au
fureteur Communicator, SmartDowload crée
un cookie permettant l’identification électronique de
l’utilisateur. Par la suite, lors de la première utilisation du
programme, si l’internaute enregistre son courriel sur le site principal de Netscape, NetCenter, ce
courriel est automatiquement intégré au cookie. Lorsque qu’un
utilisateur transfert un fichier à l’aide du programme SmartDownload,
le cookie est envoyé au bureau chef, ayant pour information le nom du
fichier téléchargé, son adresse http et l’identité électronique de
l’internaute.
D’un
point de vue pratique, supposons que l’utilisateur télécharge la dernière
version du fureteur de Microsoft à
l’aide de SmartDownload de Netscape. L’espiologiciel enverra au bureau chef le nom du fichier
d’installation (<ie5etup.exe>), le lieu du téléchargement et
l’identification électronique de l’internaute. Ainsi Netscape peut
savoir quelle version du fureteur l’utilisateur
télécharge de son compétiteur.
C’est
ce qui ressort du recours collectif amendé et déposé le 3 août 2000 dans
le district de New York. AOL
soutient qu’il n’utilise pas l’information générée par SmartDownload
et qu’il éliminera le cookie contesté. Les militants de la
protection de la vie privée n’ont qu’à bien se tenir, car d’autres
espiologiciels sont soupçonnés dans RealDownload,
NetZip et ICQ.
Charles
Perreault
charlesperreault@hotmail.com
Liens :
>Recours
collectif contre Netscape/AOL,
voir New cases à :
<http://www.a-g-s.com>
;
>Programme
de détection d’espiologiciel OptOut
:
<http://www.grc.com>.
|